À l’occasion de la sortie de Shock to the System Part 2 le 12 septembre dernier, nous avons eu l’opportunité d’échanger avec Chris Daughtry. Dans cette interview intimiste, l’artiste revient sur la genèse de ce diptyque, entre introspection, deuil et renaissance. Des thèmes sombres mais porteurs d’espoir, où la musique devient à la fois un exutoire et un moyen de connexion universel. Chris nous a également parlé de son processus créatif, de ses inspirations, ainsi que de son retour très attendu en Europe, et notamment en France !
Bonjour à toutes et à tous, nous sommes ici avec Chris Daughtry pour parler de ton récent EP Shock to the System Part 2, sorti le 12 septembre. Tout d’abord, félicitations pour cette sortie.
Merci, merci beaucoup.
Tout d’abord, si tu devais le décrire en un mot ?
Honnête.
Tu avais sorti la première partie en 2024. C’était un EP sombre, introspectif, mais avec une touche d’espoir. Est-ce que tu as l’impression que la deuxième partie continue sur cette lancée, ou est-ce plutôt le résultat de la réflexion et de l’introspection présentes dans la première ?
C’est toujours très ancré dans l’obscurité, et ça vient de cette période introspective de ma vie. Mais je pense qu’il y a un peu plus d’espoir dans la deuxième partie que dans la première. On a même choisi de l’ouvrir avec, selon moi, la chanson la plus porteuse d’espoir du disque, Divided. Si on écoute les deux parties à la suite, il fallait ce changement après The Dam. C’est une chanson sombre, pas désespérée, mais avec un sentiment d’angoisse. Alors que Divided est plus hymnique, ça ramène l’énergie. C’était nécessaire pour séparer un peu les deux parties. Et puis The Bottom est inspirante à sa manière. Mais oui, il reste beaucoup d’introspection sombre dans cette partie du disque, si tant est que ça existe comme expression [rires].
Dans la musique, ça peut en être une !
Exactement.
Donc, ça semble être quelque chose de cathartique. La musique est souvent une catharsis. Comment penses-tu qu’elle peut aider les gens dans ce travail ?
Je sais combien ça m’a aidé d’écrire ces chansons. Je faisais encore face au deuil, à la perte de ma mère et de ma fille. Mais ça m’a aussi forcé à regarder certaines choses en moi, des choses que j’avais peut-être refoulées pendant des années. Pas seulement des choses non résolues, mais dont je ne savais même pas qu’il fallait m’en occuper.
Traverser tout ça m’a ouvert en deux, au point de me permettre de voir ce que j’avais besoin d’examiner de plus près. Et je l’ai fait à travers les chansons. Chaque jour en studio ressemblait à une séance de thérapie, même quand on n’écrivait pas. Rien que discuter de ce qu’on vivait était thérapeutique et finissait parfois par se retrouver dans les textes.
La musique est un langage universel. Elle franchit les barrières et vient nous chercher quand on en a besoin. Même après avoir écrit un morceau, une fois qu’il est mixé, masterisé, prêt à sortir, il prend souvent un sens totalement différent pour moi. C’est la magie de la musique : elle vient à toi, là où tu es. Parfois, ce n’est qu’un bon morceau, et parfois ça te bouleverse d’une manière indescriptible, presque spirituelle.
D’abord, je voulais te dire que je suis désolée pour tout ce que tu as traversé. On dit souvent que les plus grands artistes viennent des endroits les plus sombres. Félicitations, parce qu’utiliser la musique comme thérapie, beaucoup essaient, mais ce n’est pas toujours évident et ça ne les aide pas toujours autant qu’ils l’avaient espéré. Et je suis heureuse si ça t’a aidé.
Merci, merci beaucoup.
Concernant les deux parties, est-ce que le choix de les séparer était seulement pour distinguer le côté sombre du côté plus porteur d’espoir, ou y avait-il autre chose derrière ?
Il y avait autre chose. Quand on a commencé à travailler sur la Partie 1, des morceaux comme Pieces, The Reckoning ou Artificial semblaient tellement urgents qu’il fallait les sortir tout de suite. On ne pouvait pas les garder pour plus tard. J’ai appelé le label en leur disant : “Je sais qu’on n’a pas fini l’album, mais cette chanson doit sortir maintenant.”
Puis on est partis en tournée, et quand je suis revenu en studio, on n’avait pas beaucoup avancé. L’album complet semblait impossible à finir. C’est là que le label a proposé : “Et si on le séparait en deux parties ?” J’ai trouvé l’idée géniale. On n’avait jamais fait ça, alors on a foncé.
Mais au moment d’attaquer la Partie 2, c’était paralysant. On était tellement satisfaits de la première qu’on ne savait pas par où commencer. On avait des ébauches, quelques refrains, des bouts de couplets. Antidote, par exemple, n’était qu’un brouillon à ce stade.
Un jour, je me plaignais en studio, je disais : “J’aimerais pouvoir juste dormir et oublier tout ça.” Pas dans un sens suicidaire, mais juste un besoin de repos. Et Scott, notre producteur, a commencé à fredonner : “I keep on dreaming of the day I die.” C’était brutal, mais juste. Ça m’a rappelé Chris Cornell et The Day I Tried to Live. Ça a donné le ton.
À partir de là, les chansons se sont libérées. On n’écrivait pas pour la radio, mais avec honnêteté. Cette liberté a tout changé. Et finalement, si on avait forcé pour en faire un seul album, on n’aurait pas eu ces titres.
Et c’est une approche qui colle aussi à la façon dont les gens consomment la musique aujourd’hui, morceau par morceau plutôt qu’album par album. Peut-être que c’était mieux aussi sur le plan marketing ?
Oui. Ça a permis à chaque partie d’avoir sa propre voix. Est-ce que ça deviendra la norme ? Pas forcément. Mais pour ce projet, c’était idéal.
Et il y a une chanson éponyme, mise sur la première partie. Pourquoi ce choix ?
C’était un des premiers morceaux terminés, et je savais que l’album s’appellerait comme ça. Ça représentait bien l’effet que les chansons pouvaient avoir sur le public. Les thèmes abordés, les mots utilisés, même le fait de jurer dans mes textes, chose que je n’avais jamais faite. Tout ça entrait dans cette idée de “choc”. Quand on a décidé de couper en deux, j’ai voulu garder ce titre et l’étendre aux deux parties.
La deuxième partie commence avec une intro qui enchaîne sur Divided. D’où vient cette idée ?
À la base, c’était juste une longue intro de Divided. Je voulais une ouverture atmosphérique, un peu inquiétante, qui se transforme en quelque chose de plus grand. Si on écoute la Partie 1 enchaînée avec la Partie 2, ça devient un pont. Je l’ai appelée The Seeds, en lien avec la phrase “We are the seeds fallen from the stars” dans Divided. C’était une métaphore de quelque chose de petit qui grandit.
Est-ce que tu as le même processus créatif pour chaque titre, ou ça dépend ?
Ça dépend. L’inspiration vient quand elle veut. Terrified, par exemple, est née après qu’on a vu Korn jouer devant 90 000 personnes. On s’est dit qu’il nous fallait un morceau avec ce rebond, cette énergie. On a commencé à travailler dessus, puis notre producteur Scott a amené une nouvelle piste qui a tout déclenché. J’ai écrit les paroles presque d’un seul coup, en marchant dehors. C’était comme si elles flottaient dans l’air et que je n’avais qu’à les attraper. Ce morceau parle de ma colère, de mon tempérament, et de la manière dont je n’avais jamais vraiment affronté ça. C’était cathartique, comme si la chanson s’écrivait toute seule.
Et la dernière chanson, Antidote, pourquoi la mettre à la fin de la deuxième partie ?
Oui. Ce titre est très personnel. Il parle de ma fille et de ses problèmes de santé mentale, et du sentiment d’impuissance que j’avais. C’était impossible de le placer ailleurs. C’est une chanson qui demande au public de rester avec elle, de la ressentir. Il n’y a rien après. Elle devait être la conclusion.
C’est très beau. Et on sent que presque toutes les chansons ont une signification profonde pour toi, même si tu arrives à glisser un peu d’espoir dans l’obscurité.
Oui, parce que c’est ça, la vie. Même dans nos moments les plus sombres, il y a toujours une petite lumière. Et j’espère que les gens ressentiront ça, qu’ils sauront qu’ils ne sont pas seuls.
Tu repars bientôt en tournée européenne, et notamment en France. Comment tu te sens ?
Très excité ! J’adore la France, même si ça fait longtemps qu’on n’y est pas venu. À chaque fois, les fans sont incroyables. J’aimerais parler mieux français. Mais j’adore la culture, et jouer en Europe a toujours une énergie particulière. On a vraiment hâte de revenir.
Et pour finir, as-tu un message pour tes fans ?
Merci pour votre patience, merci pour votre soutien. Et on a vraiment hâte de vous revoir.